LE SEL DE LA VIE
Ce post a fait l'objet de beaucoup de recherches et documentations. Les photos ont été prises en 1988 lors de l'un de mes premiers reportages photos et elles sont donc scannées et retouchées. Soyez indulgents (es) en ce qui concerne leur qualité et ne regardez que la scène qu'elles représentent ... Ce message risque d'être long et quelque peu technique mais j'espère qu'après l'avoir lu et vu, ... OUTRE LE GOÛT ... LE SEL AURA POUR VOUS UNE HISTOIRE !
Nous utilisons tous du sel TOUS LES JOURS et cela dure depuis l'antiquité ! Celui des Pesquiers était plutôt destiné à la fabrication de savon, Javel et au déneigement car sa teneur en magnésium et son amertume n'était pas appréciées pour en faire du sel de cuisine ou de table !
Mais nous sommes nous demandés comment “il arrivait” sur notre table !????
AVANT
(Photo prise d'un hélicoptère par mon fils aîné
dans les années 1980 avec un Instamatic Kodack !)
Ceux qui ont pu admirer, en passant par le bord de mer d'Hyères dans le Var (avant l'an 2000), ces “montagnes” de sel qu'on nomme les “camelles” sont bien chanceux (et j'en suis) car elles n'existent plus !
Ici l'eau est saturée de sel mais contient également de micro-algues : la Duna lulla salinae qui teintent l'eau et donnent leur couleur rosée au plumage des flamants ! Pour l'anecdote : plus le flamant et rougeâtre, plus il est considéré par la femelle comme "bon reproducteur" !
MON PETIT "GRAIN DE SEL"...
Les salins ne sont plus qu'une étendue de marais nauséabonds où heureusement vivent encore de nombreux oiseaux migrateurs qui peuvent eux aussi disparaître ! Mais nous sommes d'ores et déjà certains que cette zone est protégée par le Patrimoine et qu'aucune construction n'y sera érigée ! Le Conservatoire du Littoral s'emploie à réhabiliter cette merveille de la nature du mieux qu'elle peut. Actuellement, des efforts sont faits pour que les flamants roses nident aux Pesquiers et aux Vieux Salins en apportant la végétation nécessaire. Il était également question, lors d'une conférence à laquelle j'ai assisté le 10 juin 2005, d'un circuit d'eau simplifié au service de la biodiversité.
A l'heure où j'écris ce post, je ne sais nullement où en sont ces travaux ?!
Mais rêvons du passé et .... imaginons ce merveilleux paysage aquatique des salins des Pesquiers. Il s'étend à perte de vue et seules les "montagnes" blanches de sel que le couchant teinte d'ocre, rompent la ligne d'horizon.
Quelques statistique au passé
Au
milieu du XIXe s, on dénombrait une cinquantaine de salins, de
Leucate à Hyères. Ces exploitations d'importances
diverses occupaient en permanence près de quatre cents
ouvriers, auxquels s'ajoutaient, au moment de la saunaison, trois
mille intérimaires. Le métier était recherché
à cause de ses salaires élevés, au-dessus de la
moyenne nationale. En 1845, la paie journalière était
d'environ deux francs pour huit heures de travail. Plus tard, elle
n'avait pas diminué et les sauniers de 1910 conservait leur
pouvoir d'achat.
La production atteignait 250 000 tonnes de sel
par an aux alentours de 1850. L'emploi des mules avait conduit les
entrepreneurs à cultiver du fourrage dont ils vendaient les
surplus. Des pêcheries et des ateliers de salaison avaient été
mis en place.
La
voie de chemin de fer
La
première apparition du train aux Salins remonte au 10 02 1876.
Le
tronçon La Pauline-Hyères avait été
inauguré deux mois plus tôt, le 06 12 1875. Des navettes
quotidiennes assuraient le ravitaillement des Salins et de la Marine,
propriétaire de l'ensemble des terrains (!).... Le train
participait à l'essor économique en facilitant les
transports des salins.
L'extension
de la ligne du PLM s'avérait nécessaire depuis la
création du port par l'amiral Pothuau. Aucune route
carrossable ne reliait la gare des Salins à Hyères.
PORT
POTHUAU
La récolte dans le passé :
La Société des pêcheries et des salins d'Hyères d'où son nom actuel de Salins des Pesquiers réussit sa première récolte en 1903. A cette époque, les machines n'existaient pas et c'est "l'homme" qui récoltait le sel à la pelle, le transportait à la brouette et formait des tas mesurés au compas, tas qui déterminaient le salaire du salinier en fin de journée . Savez-vous également d'où vient l'origine du mot SALAIRE : sal en latin qui veut dire sel ! Puis, le sel était déposé au sommet de la camelle protégée des pluies par des tuiles. La pêche cessa en 1968 et on ne se consacra plus qu'à la saliculture.
Les péteuses (parce qu'elles ramassaient des petites saletés ou des cailloux (des pets) sur la camelle.
La
récolte jusqu'en 2000 :
Le
processus est assez simple : pomper de l'eau de mer et la faire
circuler sur de vastes étendues de terrains dont la gravité
s'y prête . Ces étendues “cloisonnées”
s'appellent des partènements (50 km de circuits pour les
Pesquiers) où, sous faible épaisseur elle va, en
s'évaporant grâce à l'énergie gratuite du
soleil et du vent se saturer en chlorure de sodium : 260 gr de sel
par litre d'eau (l'eau de mer en contient seulement 29 gr !)
Le grand tympan élevait l’eau à une hauteur égale au diamètre de sa roue. C’était une roue munie à sa périphérie de caisses rendues étanches au moyen de poix et de cire. Chaque caisse était pourvue sur sa paroi latérale située du côté du réservoir à alimenter d’une ouverture dans laquelle l’eau pénétrait lorsque la caisse plongeait dans l’eau et par laquelle elle s’écoulait lorsque la caisse arrivait au point haut de sa course.
LE
TYMPAN EN RUINE (sous la neige) - Photo donnée par le
Conservatoire du Littoral.
C'est alors que le sel cristallise et se dépose sur des surfaces préparées à cet effet.
Après un long parcours sinueux, la saumure concentrée à 260 gr/l arrive dans les derniers bassins dits "de tête" puis est dirigée sur les tables salantes ou cristallisoirs (lissés au buldozer) pour la dernière évaporation des eaux-mères.
Nous sommes début Septembre et, si les pluies le permettent, la récolte peut commencer.
Les
bureaux datant de 1918 qui abritent encore aujourd'hui le staff des
responsables de la protection et rénovation des salins.
Cristaux
de sel en gros plan
Le récolteur (machine poussée par un buldozer) décolle, grâce à une pelle "flottante", des bandes de sel de 1m40 à fleur de boue.
Le
récolteur au début du siècle dernier ...
On voit parfaitement ici la "délicatesse" de la récolteuse qui affleure le sol de sa pelle mécanique !
Un tapis roulant, attenant au récolteur, déverse le sel dans les bennes des tracteurs ou des camions qui vident leur chargement en rondes incessantes à la fosse de lavage ou trémie de réception.
Là, une pompe aspire de l'eau saturée qui se mélange au sel pour procéder au lavage. L'égouttage se fait à l'aide d'un tapis roulant tout au long du parcours qui est nécessaire pour atteindre le sommet de la camelle où la gerbeuse dépose la récolte.
Et les camelles "entaillées par la coltineuse :
A Oualidia (Maroc), on récolte le sel de la même façon ainsi qu'à Larrache et, dans le passé à Salé.... (d'où son nom !).
BIJOUX DE SEL
Ils
étaient fragiles, un rien pouvait les briser mais les cristaux
de sel ressemblaient à des diamants à la lumière
!
Les sauniers avaient le privilège de déposer des
objets en bois dans les puits à roue. Il y restaient assez
longtemps pour être imprégnés de saumures. Le sel
déposé leur conférait un bel aspect décoratif.
Ils étaient faits de lamelles de bois assemblées et
collées ou liées par des cordelettes. Les sauniers
fabriquaient aussi des armatures en roseau (croix, étoiles,
arbres, tourettes, petits moulins...).
Préparation de "roses de sel". Ce système a été abandonné en raison de son peu de rentabilité et de sa difficulté "climatique"
Et pour le "fun", voici un magnifique "caillou" de sel et ses cristaux aux mille facettes :
Toutes les origines du sel :
- la
récolte du sel de mer est celle décrite dans cet
article (saliculture). La saliculture est une forme méconnue
d'agriculture dont le principe est fort ancien (époque
romaine).
- Le sel gemme est le vestige des mers primitives. Il
est extrait directement selon la technique minière. Le sel
ignigène est obtenu dans les "salines" par
évaporation thermique de saumures d'origine terrestre,
produites par dissolution d'un gisement de sel gemme.
- Le sel
solaire est obtenu selon une technique originale par évaporation
naturelle sur un salin, de saumures d'origine terrestre.
PASSEZ UN BIEN BON WE !